Jon Snow : une fin similaire à Jules César, un retour digne du Christ
Parmi les événements marquants de la saga du Trône de fer, nous avons la mort de Jon Snow.
« “[...] En arrière, les autres. Rangez votre acier, nous l’effrayons.” Ne voyaient-ils
pas que le géant avait été blessé ? Jon devait mettre un terme à tout ceci, ou il y aurait d’autres morts. Ils n’avaient aucune
notion de la puissance de Wun Wun. Une trompe, il me faut une trompe. Il vit luire l’acier, se tourna de ce côté. “Pas de lames !”
hurla-t-il. “Wick, range tout de suite ce…”
Poignard, avait-il l’intention de dire. Quand Wick Taillebois frappa en visant sa gorge, le mot se changea en grognement. Jon se
tordit pour esquiver l’arme, juste assez pour qu’elle l’égratignât à peine. Il m’a coupé. Quand il porta la main au côté de son
cou, du sang coula entre ses doigts. “Pourquoi ?
– Pour la Garde.” Wick le frappa de nouveau. Cette fois-ci, Jon lui attrapa le poignet et lui tordit le bras en arrière jusqu’à
ce que Wick lâchât le poignard. L’intendant dégingandé recula, mains levées comme pour dire : pas moi, ce n’était pas moi. Des
hommes criaient, Jon tendit la main vers Grand-griffe, mais ses doigts étaient devenus raides et gourds. Il ne savait pourquoi,
il semblait incapable de libérer l’épée de son fourreau.
Puis Bowen Marsh se tint devant lui, des larmes lui coulant sur les joues. “Pour
la Garde.” Il porta à Jon un coup au ventre. Lorsqu’il retira la main, le poignard resta fiché à l’endroit où il l’avait planté.
Jon tomba à genoux. Il trouva la garde du poignard et l’arracha. Dans l’air froid de la nuit, la blessure fumait.
“Fantôme”,
chuchota-t-il. La douleur l’engloutit. Frappe-les avec le bout pointu. Quand le troisième poignard le perça entre les omoplates,
il poussa un grognement et tomba la tête la première dans la neige. Il ne sentit jamais le quatrième poignard. Rien que le froid… »
– George R. R. Martin, Une danse avec les dragons, Paris, Éditions Pygmalion, 2013, pp. 409-410
Dans l’Antiquité, une mort célèbre fait écho à ce passage du Trône de fer : celle de Jules César. En effet, Jules César est trahi lui aussi par les siens. De plus, le dernier coup de poignard asséné à Jon Snow dans la série est celui de la part d’un jeune garçon que Jon avait pris sous son aile, tel un fils. Cela fait penser aux derniers mots de Jules César : καὶ σὺ τέκνον (Toi aussi, mon enfant) adressé à Marcus Brutus.
« 82. Il était en train de s’asseoir quand les conspirateurs l’entourèrent sous
prétexte de lui rendre leurs hommages, et tout de suite Tillius Cimber, qui s’était chargé du premier rôle, approcha encore,
comme s’il avait l’intention de lui soumettre quelque demande. César fit un signe de dénégation et d’un geste repoussa la
requête à un autre moment ; Tillius lui saisit alors la toge, au niveau des deux épaules ; ensuite, César crie : “Mais
c’est de la violence !” et l’un des deux Casca le blesse par-derrière, un peu au-dessous de la gorge. [2] César saisit le
bras de Casca, le transperça de son poinçon et tenta de s’élancer, mais il fut arrêté par une autre blessure ; quand il se
rendit compte qu’il était la cible de poignards qu’on dégainait de toutes parts, il s’enveloppa la tête dans sa toge et fit
en même temps glisser, de sa main gauche, les plis jusqu’au bas des jambes, afin de tomber le plus honorablement puisque même
le bas du corps était couvert. Et ainsi fut-il criblé de vingt-trois blessures, ayant lâché seulement un unique gémissement au
premier coup, sans prononcer un mot, même si certains auteurs ont rapporté qu’il dit à Marcus Brutus, alors que celui-ci se
ruait sur lui : “Toi aussi, mon enfant !”. »
– Suétone, Vies, trad. par G. Flamerie de Lachapelle, Paris, Les Belles Lettres, 2016, p. 51
Qu’il est cruel ce George R.R. Martin ! Tuer l’un des personnages préférés des lecteurs ! Heureusement, au deuxième épisode de la saison 6, les scénaristes ont décidé de faire renaître à la vie le lord commandant de la garde de nuit à l’aide de Mélissandre et de son Maître de la lumière, qui fait lui-même référence au christianisme. Tout cela nous fait penser à la résurrection de Jésus de Nazareth.
« Le tombeau vide. Message de l’Ange.
Quand le sabbat fut passé, Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques, et Salomé achetèrent des aromates pour aller oindre le
corps. Et de grand matin, le premier jour de la semaine, elles vont au tombeau, comme le soleil se levait.
Elles se disaient entre elles : “Qui nous roulera la pierre hors de l’entrée du tombeau ?” Et ayant regardé, elles virent
que la pierre avait été roulée de côté : or elle était fort grande. Étant entrées dans le tombeau, elles virent un jeune
homme assis à droite, vêtu d’une robe blanche, et elles furent saisies de stupeur. Mais il leur dit : “Ne vous effrayez pas.
C’est Jésus le Nazarénien que vous cherchez, le Crucifié : il est ressuscité, il n’est pas ici. Voici le lieu où on l’avait
placé. Mais allez dire à ses disciples, et notamment à Pierre, qu’il vous précède en Galilée : là vous le verrez, comme il
vous l’a dit.” Elles sortirent et s’enfuirent du tombeau, parce qu’elles étaient toutes tremblantes et hors d’elles-mêmes.
Et elles ne dirent rien à personne, car elles avaient peur… »
– Les Quatre évangiles, trad. par L.-M. Dewailly, Paris, Editions du Cerf, 1971, Mc 16, 1-8, p.131
Et voilà près de dix ans que les fans de la saga littéraire attendent que George R.R. Martin ressuscite cette belle au bois dormant de Jon Snow.
